Résultats des essais de désherbage mécanique de maïs chez des agriculteurs situés sur bassin versant, en zone de captage prioritaire
Cet article fait suite à un premier article paru en 2023, présentant la démarche d’accompagnement et le suivi d’avril à juillet 2023. Les résultats sont présentés ci-dessous…
Malgré la mise en place du Plan Ecophyto depuis 2008, les ventes et l’usage des produits phytosanitaires de synthèse continuent d’augmenter en France, remettant en cause l'atteinte de l’objectif de moins 50% d'usage des produits phytosanitaires annoncé pour 2025. En parallèle, la pollution de l’eau potable aux métabolites de produits phytosanitaires, les impacts forts sur la santé des consommateurs, les attentes sociétales et les évolutions réglementaires incitent fortement à une évolution des pratiques agricoles vers la réduction de l’utilisation des intrants de synthèse.
L’activité agricole, principale sculptrice du territoire rural, ne peut être dissociée de la protection de la ressource en eau. La pression phytosanitaire dans les cours d'eau est particulièrement forte au sud de la Normandie en raison de sa topographie riche en bassins versants de surface. Le bassin versant de la Rouvre, situé au Nord-Ouest de l’Orne, est traversé par la rivière « la Rouvre » sur 42 km. Affluent de l’Orne, elle-même effluent de 11 cours d’eau : 8 rivières et 3 ruisseaux, la Rouvre est concernée par de nombreuses mesures environnementales à fort enjeux :
- D’une part sanitaire, via les aires d’alimentation de captage (étendus sur 6200 ha) à destination de l’eau potable pour les populations locales.
- D’autre part écologique, via un site Natura 2000 ("Vallée de l’Orne et ses affluents") ; 2 Espaces Naturels Sensibles (ENS) ("Roche d’Oëtre - Gorges de la Rouvre" et "Marais du Grand Hazé"), et de nombreuses Zones Naturelles d’intérêt écologiques Faunistiques et Floristiques.
Au niveau géologique, le bassin versant de la Rouvre est un terrain ancien du Massif armoricain. En aval, on retrouve des roches granitiques et en amont, des roches schisto-gréseuses du Briovérien. Ces roches sont imperméables, ce qui engendre beaucoup de ruissellement et peu d’infiltration en profondeur. Malgré tout, il y a quelques aquifères au niveau des fractures et des failles. Par conséquent, l’hydrologie de la Rouvre et de ses affluents est très dépendante des eaux de surfaces, c’est-à-dire, du climat et des pluies. Cela les rend particulièrement sensibles aux différentes sources de pollution issues des activités humaines.
En effet, le captage de la Laudière a été classé prioritaire par le Grenelle de l’Environnement en 2008 en raison des concentrations trop élevées de produits phytosanitaires relevées dans les eaux brutes prélevées depuis plusieurs années. Depuis septembre 2011, le SDE a mis en place un suivi mensuel des concentrations en pesticides et des nitrates des eaux brutes prélevées au captage de la Laudière. Depuis avril 2018 et à la demande de l’ARS, des métabolites ESA (dérivés de l’acide sulfonique) et OXA (dérivés de l’acide oxalique) de pesticides sont également recherchés. Ces molécules actives et métabolites sont notamment utilisées dans le désherbage chimique du maïs.
Le désherbage mécanique du maïs et des autres grandes cultures est l’une des solutions les plus efficaces, permettant de réduire significativement son IFT, et plus globalement son impact environnemental, dès lors que les conditions de réussite sont réunies et donc connues et maîtrisées par les agriculteurs.
Dans ce contexte, le Syndicat Départemental de l'Eau de l'Orne a mis en place plusieurs programmes d’action, dont la proposition d’un accompagnement gratuit à la parcelle et l’organisation de passage d’outils de désherbage mécaniques (herse étrille et bineuse) pour des essais de désherbage mécanique de maïs. 120 agriculteurs ont bénéficié de la proposition de ce programme, 6 ont relevé le défi, accompagnés du Réseau des CIVAM Normands en partenariat avec Bio en Normandie. L’enjeu et l’objectif de cette action était d’atteindre une réduction d’au moins 30% des IFT dans les fermes accompagnées.
Un printemps 2023 très pluvieux n’a pas facilité les premiers passages d’outils mécanique dans les parcelles de semis précoces de maïs, avant mi mai. A la fin de la campagne culturale les mesures d’IFT ont pu être réalisés. Les résultats sont satisfaisants, en moyenne les IFT ont diminué de 41%.
Focus sur les résultats de deux fermes en conventionnel accompagnées dans le cadre de cette action.
La première ferme réalisait l’essai sur une parcelle de 5 ha en précédent prairie temporaire de 4 ans, sur sol superficiel séchant et très caillouteux. Cela a permis un ressuyage rapide de la parcelle malgré les conditions globalement pluvieuse, et de réaliser début mai le premier passage de herse étrille à l’aveugle sur l’ensemble de la surface. Ainsi le 1er passage d’herbicide en racinaire a pu être évité.
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La deuxième ferme réalisait l’essai sur deux parcelles de 5 ha en précédent maïs pour l’une et en précédent blé pour l’autre. Les deux parcelles n’ayant pas bénéficié de la présence d’une prairie temporaire depuis longtemps et en rotation maïs-maïs ou maïs-blé. Les parcelles étaient sur sols limoneux peu profonds et peu séchant. L’implantation précoce du maïs, fin avril, additionné aux conditions pluvieuses n’a pas permis des premiers passages de herse étrille à l’aveugle au bon moment.
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