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© Théo Perzo

L’objectif de cette pratique est d’accumuler l’herbe sur pied, au champ en fin de printemps, grâce à une longue période de repousse. Ce fourrage sera pâturé ensuite à partir de juillet quand la croissance de l’herbe ralentit. Le but est donc d’éviter une récolte et de retarder le plus possible l’ouverture du silo. Au sommaire de notre article :

1. Conditions de réussite

2. Comment pâturer les stocks sur pied ?

3. Avantages et inconvénients

4. Suivi de 8 éleveurs pratiquant le stock d’herbe sur pied en Normandie



Conditions de réussite

    • Disposer d’une surface en herbe totale suffisante : au moins 30 à 35 ares/UGB, voire plus en conditions séchantes.
    • Prévoir environ 10 ares de stocks d’herbe sur pied par vache, pour viser 3 à 4 semaines de pâturage supplémentaire en conditions séchantes.
    • Exploitée dans la deuxième quinzaine de mai en pâturage ou en fauche (pour sectionner les épis), la parcelle est ensuite « débrayée » (retirée du cycle de pâturage) pour constituer un stock sur pied.
    • Attendre au moins 30 à 45 jours avant de le faire pâturer.
    • Avoir une ou des parcelles avec un taux de trèfle élevé (50 à 60%). L’intérêt du trèfle est qu’il conserve une bonne appétence et des valeurs alimentaires correctes, malgré des temps de repousses longs ou un début de dessèchement.
    • A contrario, éviter les parcelles avec des rumex ou chardons qui profiteraient de cette valorisation tardive.
    • Pratiquer idéalement sur des parcelles avec un sol profond, qui conservent un bon potentiel de pousse en début d’été.


Parcelle de stock d'herbe sur pied avec quelques arbres fourragers (charme, robinier faux-acacia) chez Anthony Gilmas (61) © Théo Perzo

Comment pâturer les stocks sur pied ?

    • Après 35 à 60 jours de repousse.
    • Ne pas dépasser 55-60 jours de temps de repousse en RGA-TB.
    • Pâturer en priorité les prairies avec le moins de trèfles.
    • Au fil avant pour éviter le gaspillage dû à une hauteur d’herbe importante. En revanche, le fil arrière est à proscrire, car les vaches finissent de « nettoyer » la parcelle en revenant sur la partie précédemment pâturée.
    • Pour éviter le gaspillage, il est possible de réaliser un topping avant le pâturage.
    • Les premiers jours, n’hésitez pas à offrir une surface minimale de 0.5 are par vache et par jour pour éviter de limiter la consommation de vos animaux et les chutes éventuelles de production.
    • Éviter de trop raser les prairies sous peine de pénaliser la repousse ultérieure, voire d’endommager irrémédiablement la prairie. Une hauteur moyenne de sortie comprise entre 10 cm et 25 cm est convenable.
    • Habituer petit à petit ses vaches à pâturer dans de l’herbe haute.


Avantages et inconvénients

Le principal avantage est surtout économique en limitant les chantiers de récoltes, et en réduisant les stocks de fourrages. Il n’est pas rare en effet de constater l’inverse : ensiler ou enrubanner début juin pour ne pas être débordé par l’herbe et être obligé d’ouvrir le silo début juillet… Sachant que l’herbe récoltée coûte 3 à 4 fois plus cher que l’herbe pâturée, il y a là un intérêt très net pour adopter la technique du stock sur pied.

Avantages

Inconvénients

  • Prolonger le pâturage estival (notamment en zone séchante).
  • Bonne valeur alimentaire même sèche.
  • Retarder la réouverture du silo = économiser des stocks.
  • Ration peu couteuse.
  • Eviter de rentrer des animaux en bâtiment et de les affourager.
  • Gain de temps (moins de distribution, moins de paillage, moins d’effluents, moins de récoltes).
  • Diminue les charges de mécanisation et donc de fuel.
  • Prolonger le pâturage estival (notamment en zone séchante).
  • Bonne valeur alimentaire même sèche.
  • Retarder la réouverture du silo = économiser des stocks.
  • Ration peu couteuse.
  • Eviter de rentrer des animaux en bâtiment et de les affourager.
  • Gain de temps (moins de distribution, moins de paillage, moins d’effluents, moins de récoltes).
  • Diminue les charges de mécanisation et donc de fuel.

 


Vaches nourrices avec des veaux dans des stocks sur pied en pré-verger chez Christophe Davy (61) © Théo Perzo

Suivi de 8 éleveurs pratiquant le stock d’herbe sur pied en Normandie

Dans le cadre d’un financement de l’Agence de l’Eau Seine-Normandie (AESN), 8 éleveurs (7 en bovin lait et 1 en bovin viande) pratiquant le stock d’herbe sur pied en Normandie (4 dans l’Orne du groupe ARADEC, 1 en Seine Maritime du groupe LHSM et 3 dans l’Eure du groupe CIVAM de l’Eure) ont été suivis avec le même protocole pour acquérir des références sur la pratique dans notre contexte et la diffuser à d’autres éleveurs souhaitant la prendre en main. Ainsi, des analyses de valeur alimentaire et floristique des prairies pâturées ainsi que des mesures de hauteurs et de biomasses ont été réalisées. Voici quelques-uns des principaux résultats :


Histogramme de la répartition floristique chez les 8 éleveurs étudiés © Théo Perzo

Il est important de préciser que chez les 4 éleveurs de l’Orne les stocks d’herbe sur pied sont faits sur des prairies naturelles permanentes (PP) quand chez 3 des éleveurs de Haute-Normandie ils sont réalisés sur des prairies temporaires (PT) avec des proportions importantes de trèfles dans le mélange semé. Cette analyse floristique est à mettre en lien avec l’analyse des valeurs alimentaires :


Courbes des principales valeurs alimentaires chez les 8 éleveurs suivis © Théo Perzo

En effet, on constate assez logiquement que la part de légumineuses est proportionnelle aux Matières Azotées Totales (MAT) ainsi qu’aux Protéines Digestibles dans l’Intestin grêle permises par l’azote (PDIN). De plus, les Unités Fourragères Lait (UFL) sont bonnes avec une moyenne à 75 pour l’Orne et 82 UFL/kg MS en Haute-Normandie. De même, on peut noter en moyenne des PDIN et PDIE légèrement inférieurs dans l’Orne en comparaison avec la majorité des prairies temporaires de Haute-Normandie avec respectivement 63 g/kg MS contre 85 pour le PDIN et 73g/kg MS contre 84 pour le PDIE. Globalement, on remarque que les valeurs alimentaires sont correctes et assurent une bonne alimentation aux bovins même en production. Toutefois, il est à préciser que le type de prairie mais aussi et surtout le temps de repos avant pâturage de ces stocks sur pied diffèrent grandement entre l’Orne et la Haute-Normandie. En effet, dans l’Orne, 2 éleveurs ont un temps de repos de 60 jours, un autre de plus de 8 mois et le dernier 10 ans (friche récupérée cette année) quand pour la Haute-Normandie le temps de repos moyen est de 48 jours. On a donc bien deux modèles d’utilisation de la pratique du stock sur pied pour des objectifs différents selon les zones géographiques :

  • Dans l’Orne, des bêtes qui ne sont pas à proprement parler en pleine production de lait (veaux, génisses, taureaux, vaches nourrices et taries) valorisent des prairies permanentes riches en graminées avec un temps de repos conséquent souvent difficilement exploitables à la faucheuse (pré-verger, parcelles éloignées ou humides)
  • En Haute-Normandie, des vaches majoritairement en pleine production laitière qui exploitent des prairies temporaires riches en légumineuses avec un temps de repos plus faible avec pour objectif principal de prolonger le pâturage l’été sans rentrer les bêtes en bâtiment tout en limitant la mécanisation


Histogrammes des hauteurs (entrée, sortie et consommée) mesurées chez les 8 éleveurs étudiés © Théo Perzo

On observe sur le graphique ci-dessus que dans l’Orne les bêtes entrent en moyenne dans des stocks sur pied très haut (94 cm) en comparaison à la Haute-Normandie (43 cm) et qu’ainsi elles consomment en moyenne dans l’Orne presque le double de la hauteur consommée en Haute-Normandie respectivement 66 cm contre 34.


Histogrammes des biomasses (entrée, sortie et consommée) et de leurs estimations (consommée et disponible) à partir du pourcentage de matière sèche © Théo Perzo

L’analyse de la biomasse fait écho à l’analyse de la hauteur d’herbe : on retrouve les mêmes tendances avec en moyenne des biomasses d’entrée et consommée supérieures dans l’Orne. Enfin, on constate qu’en moyenne les estimations de la biomasse consommée et disponible sont également supérieures dans l’Orne avec respectivement 3,35 t MS/ha contre 2,70 et 4,91 t MS/ha contre 3,18.


Histogrammes de comparaison entre l'estimation de la biomasse consommée mesurée et celle du logiciel HerbValo © Théo Perzo

Pour compléter l’analyse de la quantité d’herbe valorisée par ces stocks sur pied nous avons utilisé le logiciel HerbValo, développé par l’INRAE et l’IDELE, qui permet d’estimer la biomasse consommée. Ainsi, sur le graphique ci-dessus, on constate d’importantes différences entre nos mesures de biomasse sur le terrain et l’estimation faite par le logiciel. Toutefois, en moyenne il y a peu de différences entre la quantité d’herbe valorisée entre l’Orne et la Haute-Normandie avec respectivement 327 kg MS/ha/j contre 367 d’après HerbValo et 601 kg MS/ha/j contre 602 d’après nos mesures.


Histogrammes de l'économie mesurée et estimée par HerbValo © Théo Perzo

En fixant le coût d’un kg de MS de foin à 0,065€ soit 65€ la tonne, on estime en moyenne une économie entre 21 et 39€ par jour. Or, la majorité des éleveurs étudiés réalisent des stocks d’herbe sur pied sur plusieurs semaines (3-4 au moins). Ainsi, on peut estimer une économie entre 675€ et 1170€ sur un mois ce qui est non négligeable.

Les éleveurs suivis ont principalement recours au stock sur pied pour les raisons suivantes :

  • Valorisation d’une parcelle non fauchable mécaniquement en raison de l’humidité ou des arbres, leur permettant ainsi de valoriser au maximum l’herbe et les arbres fourragers par leurs animaux
  • Economiser les charges et diminuer son coût alimentaire
  • Valoriser des parcelles de moins bonne qualité par les animaux dits « improductifs » (vaches nourrices, veaux, taureaux, vaches taries, génisses) mais aussi par les animaux en production

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Photographie de vaches nourrices et de veaux dans des stocks sur pied en pré-verger chez Jacques Mousset (61) © Théo Perzo

Ces suivis seront reconduits chez les 8 mêmes éleveurs étudiés pour les deux prochaines années (2026 et 2027) grâce à un financement de l’AESN. L’objectif est de renforcer nos résultats et nos tendances mais aussi d’observer la pratique du stock sur pied sous différentes conditions (années humide et sèche). En effet, en cas de sécheresse, stocker l’herbe sur pied pour la période estivale reste une technique très valable pour prolonger le pâturage, en particulier sur des associations à base de trèfle blanc/violet, lesquelles sont capables de conserver 80 % de leur valeur alimentaire à 60 jours de repousse. Même sèche, l’herbe d’associations sur pied est une ressource à ne pas mépriser ni sous-estimer.

Afin d’affiner l’analyse, plusieurs pistes d’études sont envisageables :

  • Évaluer précisément avec chaque agriculteur l’économie de mécanisation (tracteur et fuel) ainsi que le temps de travail ;
  • Évaluer l’influence de l’éducation/entraînement des bêtes à s’alimenter avec une herbe haute sans la gaspiller, sans doute par la hauteur de sortie ;
  • Évaluer l’équilibre entre gaspillage et retour au sol de l’herbe, peut-être par des analyses de sol ;
  • Évaluer l’impact du pâturage du stock sur la production laitière et le gain moyen quotidien (GMQ).

Cet article a été rédigé par Théo Perzo, animateur agriculture durable.

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